La cinquième République a pris l'habitude de laisser aux manifestations populaires, un triangle compris entre Bastille, Nation et République. Une façon de parquer la colère dans une géométrie longtemps conciliante, puisque du même bois. Les "Gilets Jaunes" portent le fer au sein même du royaume des nantis, ce qui fait tâche dans l'univers feutré des affaires. Mais le symbole est fort : rendre visite à ceux qui les ignorent est une façon comme une autre d'imposer la mixité sociale. L'affaire est entendue, et il ne sert plus à rien de brandir les mots fléchés comme "populisme", "poujadisme", "radicalisation", etc. Le mouvement des "gilets jaunes" est avant tout un vrai mouvement social, qui plus est, populaire. Embarrassé par une vision d'uniformité désordonnée dite "vision de la poule", La République En Marche souhaite rester dans le vieux monde en dénonçant les "beaufs anti-écolos" manipulés par le Rassemblement national. Il est vrai que c'est pratique et puis, cela pourrait servir lors des élections européennes qui arrivent. Mais en tenant ce discours, le gouvernement enfile, sans doute malgré lui, le costume étriqué du citadin nanti qui se sent importuné par les gueux sans dents et sans avenir ; l'uniforme empesé du premier de cordée qui sent du mou dans la corde ; la livrée repassée du grand vainqueur de la mondialisation heureuse qui découvre que ce bonheur est à géométrie variable. Le plus étonnant, dans le mouvement des "Gilets Jaunes", c'est l'absence du bouc émissaire habituel, c'est à dire l'étranger ou le migrant. L'intelligence se pose ici par la désignation claire de l'adversaire : les gouvernements successifs et la classe dirigeante dans son ensemble. Certes, comme le mouvement est composite, il y a parfois des dérapages, certaines contradictions et quelques demandes extravagantes. Mais la protestation, globalement, se dresse contre la vie chère, les bas salaires, la dureté du quotidien et l'inégalité fiscale et sociale. En fait, c'est un discours de gauche, je veux dire, du temps où la gauche se souciait de défendre les plus défavorisés, avec des valeurs comme la justice et l'égalité. La disparition de cet objectif au sein du parti socialiste et l'exubérance du chef de la France insoumise ont laissé un grand vide. N'étant plus représentés et encore moins pris en compte, les "Gilets Jaunes" ont craqué et d'une colère montée, la mayonnaise a pris. Et c'est le président actuel qui centralise les colères, mais il n'est pas, loin de là, le seul responsable. Même si sa morgue n'a rien aidé, on ne peut, par soucis d'objectivité, lui imputer l'entièreté de la responsabilité. De fait, l'enrichissement des riches, qui est à l'oeuvre depuis au moins quarante ans, a fait exploser le prix des logements en ville. En face, la stagnation du pouvoir d'achat des classes moyennes et populaires, les a poussées de plus en plus loin du centre ville et encore bien plus loin de leur lieu de travail. Ce qui transpire de cette colère, c'est bien une lutte des classes mais qui se dédouble dans une lutte des espaces. Si les hausses de carburant ont mobilisé, elles sont surtout le reflet de ce que le britannique David Goodhart nomme, dans son essai : "The road to somewhere" (La route de quelque part), les "anywhere" (de Nulle part) contre les "somewhere" (de quelque part). Un "anywhere" appartient à la classe privilégiée, mobile et mondialisée. Un "somewhere" est attaché à son espace, son endroit, son identité. Il souffre face aux mutations qui vont trop vite. Il se sent surtout lésé par une mondialisation vendue comme une opportunité et qui pour lui, se révèle être un désastre. "Etre né quelque part" chantait Maxime Le Forestier. C'est bien le clivage. Quand le "anywhere" peut décider de s'expatrier pour protéger sa fortune de l'impôt, le "somewhere" prend de plein fouet une fiscalité qui s'impose à lui dans toute sa force et souvent dans toute son injustice. Il sent confusément qu'il est pris pour le dindon de la farce. Il paie pour des services qui s'éloignent de lui : plus de gares, de postes, d'hôpitaux, de tribunaux, d'écoles, de gendarmeries et par simple logique, encore moins de cinémas, de théâtres, d'épiceries. Il sait que ce qui lui est pris, jamais ne reviendra. Alors, n'ayant plus rien à perdre, le "Gilet Jaune" sera jusqu'au-boutiste et, parti d'une simple proposition sur les réseaux sociaux, le fleuve qui enfle ne peut que déborder. La classe populaire et la classe moyenne sont, en France, largement majoritaires. Unies dans une même douleur, elles représentent aujourd'hui, le flambeau d'un espoir qui se décline, à chaque carrefour, par une tonitruante Marseillaise. Un chant dont l'aspect révolutionnaire ne doit pas échapper à une classe dirigeante que sa surdité a délégitimé. Le jaune est une belle couleur. En savoir plus Le titre de cet article est inspiré de la magnifique chanson de Claude Nougaro : Mai mai mai Paris mai, mai mai mai Paris.
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Jaune jaune jaune le gilet, jaune jaune jaune il est La cinquième République a pris l'habitude de laisser aux manifestations populaires, un triangle compris entre Bastille, Nation et République. Une façon de parquer la colère dans une géométrie longtemps conciliante, ... <a href="https://www.loi1901.com/intranet/a_news/index_news.php?Id=2508" target="_blank">Lire la suite sur Loi1901.com</a>
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