Suite à notre parution la semaine dernière du premier épisode de l'histoire de la loi de 1905, nous avons reçu de la part de Monsieur Maurice Gelbard (qui fait autorité en la matière) cette analyse de la génèse de cette loi. L'actualité nous parle beaucoup de la loi de séparation des Églises et de l'État. On en a dit tant de choses qu'il faut en préciser un certain nombre. 1° Ce n'est pas une loi sur la laïcité. Ce mot emblématique n'a été prononcé que deux fois au cours des 48 séances qu'ont duré les débats à la Chambre des députés. La laïcité de l'État a commencé avec la Révolution française par la laïcisation de l'État civil , la laïcisation de l'enseignement à partir de 1882 en est une suite. Mais il y a eu bien d'autres événement, par exemple : 1. suppression de l'aumônerie militaire instituée en 1874 (8 juin 880) ; 2. suppression, fonctionnaires exceptés, du repos dominical institué en 1814 (12 juillet 1880), remplacé en 1906 par le repos hebdomadaire; 3. allégement des honneurs militaires rendus au saint sacrement; 4. suppression des prières publiques a rentrée des Chambres (14 août 1884), de la messe du Saint Esprit - présence obligatoire - à la rentrée des Cours et des Tribunaux (14 décembre 1900) ; 5. loi municipale du 5 avril 1884 et ses incidences religieuses; 6. loi Naquet rétablissant le divorce 27 juillet 1884) ; 7. loi sur la liberté des funérailles et l'appréciation des dernières volonté les défunts (15 novembre 1887) ; 8. loi sur le monopole des inhumations enlevé aux fabriques (28 décembre 1904); 9. lois militaires de 15 juillet 1899 et 24 mars 1905 (”les curés sac au dos”); 10. suppression du traitement des aumôniers des hôpitaux et hospices relevant de l'Assistance publique (1883) laïcisation progressive, de 1878 à 1891, des hôpitaux de Paris; 11. suppression des religieuses infirmières dans les hôpitaux de la Marine (11 novembre 1903), puis dans tous les hôpitaux militaires (1er janvier 1904) ; 12. circulaire du ministre de la Justice ordonnant l'enlèvement des crucifix dans les prétoires de tous les tribunaux (1er avril 1904)... La revendication de la séparation des Églises et de l'État, qui avait existé de 1794 à 1801, a été reprise par Gambetta et les républicains en 1869. Ce dernier n'en a rien fait quand il a été président du conseil. C'était un ”opportuniste”, favorable aux réformes ”opportunes”, et il pensait que le moment n'en était pas venu. A partir de 1876, ses amis politiques réclamèrent la séparation des Églises et de l'État. A cette époque déjà, pour qu'une loi fut adoptée, le gouvernement devait déposer un projet, ou des parlementaires devaient prendre l'initiative d'une proposition : 1. qui aurait dû être être ”pris en considération” par la Chambre pour qu'une commission soit nommée pour l'examiner. 2. Cette commission aurait dû rédiger et déposer un rapport concluant ou non à la nécessité du texte. Rapport qui n'était parfois pas rédigé, ou même la commission ne se réunissait pas. 3. Enfin, la Chambre votait, ou non, ”la discussion”. Le Gouvernement pouvait intervenir pour influencer les décisions . Les députés pensèrent qu'il était plus simple de demander la suppression du budget des cultes ; ce qu'ils firent pendant près de trente ans lors des discussions budgétaires. Depuis 1801, le culte était, de par le Concordat, un service public dont le budget était voté. Cette obligation faisait défendre ce budget par le président du conseil quel que soient ses sentiments. Ainsi, en 1887, M. Goblet, pourtant favorable à la séparation, déclarait, en grand homme d'État : [ ... ] Et permettez-moi de vous faire cette simple observation. Le jour où vous auriez supprimé par voie budgétaire, si vous pouvez y parvenir, le budget des cultes, est-ce que vous auriez supprimé le service des cultes ? Est-ce que vous auriez supprimé les cultes ? Est-ce que vous empêcheriez que la majorité de ce pays ne tint encore à l'existence des cultes ? [ ... ] Il y a beaucoup de membre de cette majorité [ ... ]; je parle de cette majorité du pays [ ... ]; qui, [ ... ], se compose de gens qui pratiquent la religion catholique, mais qui n'en sont peut-être pas plus catholique pour cela[ ... ]. Mais pouvez-vous empêcher qu'ils ne tiennent à faire consacrer par la religion, par les prêtres, les principaux événements de leur existence ? (Nouvelles interruptions sur les mêmes bancs) [ ... ] Est -ce que vous pouvez empêcher que la majorité dans ce pays tienne encore à faire appel aux ministres du culte pour le baptême de l'enfant, pour le mariage, pour les enterrements? (Interruptions à gauche.) [ ... ] Dès lors, il ne vous suffit pas de supprimer le budget des cultes; il faut que d'une autre manière vous organisiez la liberté, non pas pour ces croyants - ils ne le sont pas tous mais pour ces pratiquants, la liberté et le moyen de continuer l'exercice de leur culte [ ... ] sans avoir fourni à ceux qui tiennent au culte les moyens d'y pourvoir par d'autres procéder, et par conséquent sans avoir organisé au moins la liberté d'association avec une certaine personnalité civile au profit des associations religieuses. (Mouvements divers). Autrement dit, et ce sera repris par M. Waldeck-Rousseau, autre grand homme d'État, si vous voulez la séparation des Églises et de l'État, il faut d'abord faire une loi sur les associations. Tous les hommes politiques en était bien conscients. C'est pour cela qu'il a fallu déposer 34 propositions et projets de loi pour la loi sur les associations, et que les débats ont duré du 15 janvier au 30 juin 1901. 2° Ce qui a été fait en 1905. On a ”privatisé” le service public. Les églises étaient gérées par des établissements public du culte : les ”fabriques”. Ces établissements cessaient d'exister. Leurs biens étaient transmis à des ”associations cultuelles”. C'est ce qui s'est immédiatement passé pour les cultes protestants et israélite. Il a fallu attendre 1924 que le Saint-Siège accepte la création d'association diocésaines. 3° Que dit la loi : De nombreux articles n'ont plus de raison d'être : ils ont trait aux pensions des ministres du cultes -ceux-ci ne sont plus là; ou à la dévolution des biens - réglée depuis longtemps. Sont importants, les deux premiers articles : 1. La République française ne reconnaît, ni ne subventionne ni ne salarie aucun culte. Par contre, elle assure la liberté de conscience et garantit le libre exercice des cultes avec des restrictions édictées dans l'intérêt de l'ordre public. Ce libre exercice du culte, garanti par la loi, est la seule liberté publique à jouir de cette assurance dans le seul pays du monde à lui donner force de loi ! Avant la loi de séparation, il n'y avait que quatre cultes ”reconnus”, les autres, ne demandant rien, étaient ”tolérés” puisqu'on n'en parlait pas tant qu'ils ne faisaient pas parler d'eux. 2. Autre article important, celui qui stipule que les édifices servant à l'exercice public du culte, ainsi que les objets mobiliers les garnissant, seront la propriété de l'État, des département ou des communes, mais laissés gratuitement à la disposition des établissements publics du culte, puis des associations appelées à les remplacer. Sacrée subvention quand on a dit plus haut que le culte n'était plus subventionné ! !! Il ne faut surtout perdre de vue les articles 31 à 35. C'est à dire la condamnation de ceux qui veulent contraindre, par des moyens physiques et/ou moraux, les autres à croire ou à ne pas croire. Ceux qui perturbent le (bon) déroulement du culte. Ceux des ministres du culte qui profitent de leur situation pour faire de la politique . Cette loi à été plusieurs fois remaniée depuis sa promulgation. Tout dépend du remaniement ! Pour plus de précisions, je vous invite à visiter le site www.eglise-etat.org Maurice Gelbard
Voici le tag Internet à sélectionner, à copier et à coller sans transformation dans la page du site où vous allez utiliser cet article. D'avance merci.
Le centenaire de la loi sur la séparation des églises et de l etat Suite à notre parution la semaine dernière du premier épisode de l'histoire de la loi de 1905, nous avons reçu de la part de Monsieur Maurice Gelbard (qui fait autorité en la matière) cette analyse de la génèse de cette ... <a href="https://www.loi1901.com/intranet/a_news/index_news.php?Id=534" target="_blank">Lire la suite sur Loi1901.com</a>
Facture électronique : le tour des associations viendra
09-09-2025
La facturation électronique est obligatoire aux opérations réalisées entre deux assujettis établis en France pour lesquelles les règles de facturation françaises s'appliquent (1).
Panorama associatif numéro 140 : septembre 2025
Le Panorama associatif de Loi1901 a pour objectif de vous détailler plusieurs mesures qui ne peuvent pas faire l'objet d'un article complet, à l'unité, car trop courtes. Au
L'aide-mémoire juridique de la rentrée 2025
En cette rentrée mouvementée, il nous est apparu utile de faire un rappel de tout ce que l'été législatif a modifié au regard des activités associatives. Décrets, ordonnances et
Bien réussir son Forum des associations
02-09-2025
Participer au forum des associations de votre commune est le seul réel moyen pour faire connaître votre association et solliciter de nouvelles personnes à s'engager dans vos
Panorama associatif numéro 139 : début septembre 2025
Savoir convoquer et tenir une assemblée générale en 12 points
Le mois de septembre est bien souvent la période des assemblées générales qui se tiennent juste après la fin des forums des associations. Une bonne façon de faire le bilan de
Quand le licenciement est refusé, le salarié est souvent protégé
26-08-2025
Un salarié candidat lors d'une élection professionnelle, ou bien titulaire ou encore ancien titulaire d'un mandat de représentant du personnel ou tout simplement exerçant certains
Accueil des étrangers : la solution associative
Dans le monde, une personne est forcée de fuir son foyer et de prendre la route de l'exil toutes les deux secondes en moyenne. Conflits armés, crises économiques, changement
Panorama associatif numéro 138 : fin août 2025
Le rôle des conseils départementaux de la jeunesse pour la protection des mineurs
15-07-2025
Le mois de juin a vu fleurir plusieurs décrets qui concernent la protection des mineurs dans le sport. Par exemple, l'obligation d'un affichage dans les équipements sportifs pour
Etat de droit égal droit de manifester
Hier matin, je me promenais dans un jardin public quand j'ai entendu des rires. Je me suis approché et j'ai vu cinq jeunes gens assis sur un banc. L'un d'entre eux avait un petit
La Scop : la petite graine qui pousse bien
La définition de la Coopérative est simple : "c'est une association autonome de personnes volontairement réunies pour satisfaire leurs aspirations et besoins économiques, sociaux
Service civique : beaucoup trop de ruptures de contrats
Plus d'un cinquième des missions de service civique sont rompues de manière anticipée. Ce qui fait beaucoup. Pourquoi autant d'interruptions ? Le service civique propose aux
La pauvreté : fatalité française ?
"Il n'y avait jamais eu autant de pauvres en France, ni un tel écart de ressources entre les catégories les plus aisées et les plus défavorisées." Bien sûr, l'intérêt de cette
L'appel à projets : le faux ami des associations
08-07-2025
Un appel à projets public (AAP) ou privé, est une procédure de financement par sélection de projets. Un organisme public ou privé peut monter un appel à projets dans le cadre
Comment renforcer le lien social ?
01-07-2025
C'est une bonne question que pose le titre de cet article. Oui, comment renforcer le lien social fort distendu depuis les 15 dernières années ? Un proche du président Macron,
Observatoire citoyen de la marchandisation des associations 2025
24-06-2025
L'Observatoire citoyen de la "marchandisation des associations" publie son deuxième rapport qui met en avant les moyens disponibles pour entamer la "démarchandisation des
Une histoire de poissons volants
17-06-2025
On appelle les poissons volants "exocet". Son nom a été donné à un missile français bien connu car, comme ce poisson, il vole au ras de l'eau et a coulé le destroyer britannique
Comment réunir les conditions de délégation de pouvoirs dans une association ?
10-06-2025
Une délégation de pouvoirs est l'acte par lequel une personne dite le délégant, transfère à une autre personne appelée le délégataire, une partie de ses pouvoirs. Le délégataire
Toute découverte de la science pure est subversive en puissance
03-06-2025
Rendons à Aldous Huxley le titre de cet article que nous lui avons emprunté. De son côté, Henri Michaux se plaignait déjà que "Toute science crée une nouvelle ignorance" ce qui
Quand trop, c'est trop ça ne tient plus
La présidente du Mouvement associatif, Claire Thoury, a appelé, par courrier en date du 3 septembre, les associations à se mobiliser dans un mouvement de protestation prévu pour
Pour une vraie politique des quartiers prioritaires de nos villes
L'égalité ou plutôt l'équité républicaine vise à réduire, via sa politique de la ville, l'une des manifestations les plus insupportables pour la solidarité républicaine : celle
La contribution des associations à l'intérêt général dans un contexte concurrentiel
La doctrine fiscale donne une grille d'analyse de l'intérêt général qui est devenue l'unique point de repère, l'alpha et l'oméga de la vie associative. Et pourtant, il n'y a pas
On ne touchera pas à la réduction d'impôts sur les dons aux associations
En fait, la phrase exacte est "Le gouvernement ne touchera pas à la réduction d'impôts sur les dons aux associations d'utilité publique dans le prochain budget." Oui... Et les
Soutenir et encourager la contribution des associations à l'intérêt général
Dans le contexte économique, social et écologique difficile que nous traversons, le Haut Conseil à la Vie Associative semble être le seul à garder le cap et à être force de
Observatoire des vacances et des loisirs des enfants
L'Observatoire des vacances et des loisirs des enfants (OVLEJ) a fait le choix de mettre en oeuvre une nouvelle étude permettant de prendre en compte les freins et leviers à
2025 : 20ème édition de la La France bénévole
Cette 20ème édition de "La France Bénévole" ne concerne pas l'ancienne ministre des sports, Amélie Oudéa-Castéra, qui réclame 9 000 euros bruts par mois pour être à la tête du
La 6ème Edition du Baromètre du Bénévolat se veut un peu trop rassurante
Selon le 6ème Baromètre du Bénévolat publié par France Bénévolat, les bénévoles associatifs seraient moins nombreux, mais plus jeunes et plus investis. Je veux bien le croire,
ESS : le dernier kilomètre de l'intérêt général
L'économie sociale et solidaire est un modèle à part dans l'économie française qui rassemble 14 % de l'emploi salarié privé au travers des associations, coopératives, fondations,
La place du numérique dans le projet associatif en 2025
La transition numérique, qui est un enjeu majeur pour la société française, a été adoptée très rapidement par la majorité des associations. Il y a toujours un bénévole qui possède