Privatisation ou transformation du Laboratoire français du Fractionnement et des Biotechnologies

07-03-2005
Chaque année en France, 500 000 patients sont traités par les médicaments du LFB (Laboratoire français du Fractionnement et des Biotechnologies). Prescrits à l’hôpital, ils permettent la prise en charge de 80 pathologies souvent très graves concernant parfois un très petit nombre de personnes. Aujourd’hui, le LFB est un laboratoire pharmaceutique européen reconnu dans le domaine très spécialisé des protéines thérapeutiques. Des programmes de recherche et développement importants, faisant appel aux fractions plasmatiques et aux biotechnologies, sont engagés, notamment, dans le domaine des maladies auto-immunes et les troubles de l’hémostase.

Or, depuis quelques temps le gouvernement souhaite transformer ce laboratoire en société anonyme. Les chercheurs sont très inquièts de cette modifications de statuts qui intervient après le refus du gouvernement d’augmenter les fonds nécessaires à maintenir la place de la recherche française dans le monde.

QUESTION AU GOUVERNEMENT A L’ASSEMBLEE NATIONALE
M. Jean-Claude Bois (PS- Pas-de-Calais ) appelle l’attention de M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche sur le projet de transformation du laboratoire de fractionnement et des biotechnologies (LB) en société anonyme. Cet établissement qui assure la transformation du sang et la fabrication de produits dérivés est leader mondial dans la mise à disposition de produits hautement sécurisés et dans la mise au point de techniques très avancées.

La France souffre d’un véritable déficit en matière de recherche qui représente certes un coût mais avant tout les emplois de demain. Or, depuis 2002, la France a baissé la garde et n’est plus un pays entreprenant. Quand notre pays détient une position dominante dans un secteur, la seule préoccupation du gouvernement actuel est d’en faire cadeau à des actionnaires privés. Même si les lois françaises encadrent très sévèrement du point de vue éthique, l’utilisation du sang et ses dérivés, la présence d’actionnaires minoritaires privés exigera une réduction des coûts, la réalisation de profits et donc la distribution de dividendes sur un produit d’origine humaine.

C’est pourquoi il lui demande de bien vouloir reconsidérer ce projet de transformation du LFB. - Question transmise à M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille.

REPONSE DU GOUVERNEMENT A L’ASSEMBLEE NATIONALE
La transformation du Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies (LFB) de groupement d’intérêt public en société anonyme à capitaux majoritairement détenus par l’État ou ses établissements publics ne conduit ni au démantèlement du dispositif en vigueur de sécurité des médicaments dérivés du sang (MDS), ni à la mise en cause des principes éthiques sur lesquels il se fonde. Les principes d’anonymat, de bénévolat, de gratuité du don forment le socle de la doctrine française en matière d’éthique de prélèvement de produits du corps humain. Les associations de donneurs de sang en France y sont particulièrement attachées. Ces principes sont également affirmés dans la directive européenne 2002/98/CE du 27 janvier 2003. Dans l’un de ses considérants, la directive fait en outre la liaison entre ces principes éthiques et les objectifs de sécurisation des dons. Il est donc exclu de remettre en question les valeurs de générosité personnelle qui constituent l’horizon éthique de la transfusion sanguine en Europe et que la France a contribué à faire prévaloir dans les discussions avec ses partenaires.

Le dispositif institutionnel de sécurité français est fondé sur le respect de ces valeurs et sur les enseignements tirés du drame du sang contaminé. L’évolution du statut du LFB n’a pas pour but de modifier l’architecture de ce dispositif qui repose sur la séparation des activités transfusionnelles et des activités de production des MDS et sur un double monopole ; la production des produits sanguins labiles (PSL) par un opérateur unique, l’Établissement français du sang (EPS), et le fractionnement du plasma collecté par l’EFS par un seul opérateur, le LFB. Ce système permet, par la séparation des acteurs EFS-LFB, un double contrôle interne de la qualité des produits, gage de transparence. Il permet en outre de garantir, grâce au double monopole, une traçabilité maximale des PSL et l’unité de la politique des pouvoirs publics en matière de sécurité sanitaire.

Il n’est pas envisageable de remettre en question ce système dans un contexte international de pénurie relative du plasma « éthique » et en l’absence d’une régulation européenne intégrée des PSL. La priorité du ministère de la santé est que les besoins des malades en médicaments dérivés du sang soignés dans les établissements de santé nationaux soient satisfaits. La pérennisation du LFB n’a de justification et le dispositif de sécurisation français des produits issus du sang n’a de sens que si l’établissement obéit à cet objectif d’approvisionnement national prioritaire. Et bien évidemment, dans cet objectif de réponse la plus large possible aux besoins nationaux, il n’est en particulier pas question pour les pouvoirs publics de voir disparaître la gamme des médicaments orphelins, qui constitue une vraie spécificité du LFB.

Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, l’activité du LFB doit donc demeurer sous le contrôle des pouvoirs publics. Le projet d’évolution du statut du LFB en société anonyme à capitaux publics majoritaires relève d’un choix pragmatique qui prend acte du fait que si le LFB détient un monopole d’approvisionnement en matière première, il n’a pas en revanche le monopole de l’approvisionnement des établissements de santé en MDS. Les médicaments fabriqués par le LFB sont, en effet, conformément aux règles qui régissent le marché des médicaments, en concurrence sur le territoire national avec ceux des laboratoires étrangers qui ont obtenu une autorisation de mise sur le marché.

Le statut de société anonyme a ainsi pour but de permettre au LFB, en drainant des capitaux extérieurs, d’acquérir la surface financière lui permettant d’affronter la concurrence dans les meilleures conditions en perfectionnant sa gamme de MDS et en développant la recherche sur les recombinants de substitution (produits de biotechnologie). Pour défendre ses positions, dans un secteur très capitalistique, le LFB est en effet contraint d’augmenter ses dépenses de recherche et développement, et de mettre en oeuvre une stratégie de partenariats européens. En accompagnant le développement du LFB, l’enjeu est bien, pour l’État, de donner à l’entreprise les moyens d’assurer, prioritairement, la pérennité de l’approvisionnement des établissements de santé nationaux en médicaments répondant aux exigences éthiques et aux normes de sécurité françaises, et, secondairement, de promouvoir la qualité de la production française auprès de nos partenaires européens.

Le statut de société anonyme à capitaux publics majoritaires permettra de concilier le nécessaire contrôle de l’État sur une production de médicaments stratégique en termes de santé publique et les contraintes de gestion imposées par la concurrence. Ce statut, mieux que celui d’établissement public industriel et commercial, donnera au LFB la souplesse indispensable pour lui permettre de maintenir ses positions sur le marché français et mener à bien ses efforts de développement sur le marché européen.

En savoir plus
Question N° : 54708 de M. Bois Jean-Claude ( PS - Pas-de-Calais ) - Question publiée au JO le : 28/12/2004 page : 10373 - Réponse publiée au JO le : 08/02/2005 page : 1475

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