L'impact social est aujourd'hui un terme à la mode. Le mesurer est une occupation à plein temps. Le Conseil supérieur de l'ESS en donnait, en 2011, une définition passe partout du plus bel effet : "La capacité d'une organisation à anticiper des besoins pas ou mal satisfaits et à y répondre, via ses missions de prévention, réparation ou compensation." Cela rappelle curieusement ce que font les associations depuis l'origine. Le "sens de la mesure" en moins. L'évaluation d'un objectif associatif est chose normale. Il faut bien connaître les effets de l'aide apportée, même si dans certains cas, et bien sûr au niveau local, le résultat est tellement voyant qu'il est en lui même le malade et le thermomètre. C'est à la Fonda (1) que nous devons l'import, dans notre pays, d'une pratique très courante dans les pays anglo-saxons où tout se mesure, se soupèse, s'évalue. Plus étonnant, l'Avise (2) a suivi, puis enfin de nombreuses autres officines, à leur tour contaminées. A tel point qu'aujourd'hui, des "responsables associations" de certaines collectivités locales, demandent à des présidents d'associations sidérés, une "mesure d'impact social" de leurs actions de terrain pour accorder ou pas une subvention. La mode on la suit ou on la fuit.. Pour notre part, nous avons assez rapidement fait le lien entre le besoin de mesurer "l'impact social" des actions associatives et l'arrivée dans notre pays d'une autre mode anglo-saxonne : le "Social Impact Bonds" (3). Pour mémoire, en voici le principe : L'Etat confie à une association une action sociale précise, par exemple ouvrir l'accès à l'emploi pour des adolescents sans diplôme. Une convention est signée, qui fixe des objectifs de résultats nécessairement meilleurs que les résultats actuels. Des investisseurs privés peuvent alors investir sur la base des objectifs à atteindre. S'ils sont atteints, les investisseurs percevront un certain taux de retour sur leur investissement. S'il est dépassé, cette rémunération sera encore augmentée. Si, en revanche, il n'est pas atteint, les investisseurs ne toucheront rien: ils auront alors effectué un simple don caritatif. Et c'est là que nous retrouvons l'utilité de mesurer l'impact social... Comment en effet savoir si le "Social Impact Bonds" a bien atteint ses objectifs ? Avec une étude sur l'impact social des actions menées. Sauf que ce n'est pas aussi simple que de calculer la surface d'un parking de supermarché. Cela suppose des instruments de mesure précis et incontestables. Alors, raison de plus pour aligner études et rapports qui laissent supposer qu'existe une approche "scientifique" de ce type de mesure. Et surtout une façon d'habituer les acteurs et décideurs de terrain, que le résultat d'une action associative se mesure, que l'impact social est quantifiable, que la "performance sociale" est une course au succès, le tout avec une précision aussi mensongère que l'était le ministère de la planification en URSS. La novlangue est prête : "causalité", "raisonnements contrefactuels", "contexte sociétal", "exercice de prospective", "performance sociale", "pilotage de l'action", "ruptures globales significatives", "stratégie de distinction ou d'accountability", "visée améliorative", etc. Un jargon d'entreprises hors sol pour faire rêver les décideurs locaux qui n'y comprennent absolument rien. Et c'est bien le but recherché. Noyer le poisson dans un verbiage qui se veut très "professionnel". Le propre d'un jargon, c'est de réserver aux seuls initiés la compréhension du discours. Et pour ne pas paraître idiot, que ne ferait-on pas ? Alors, on applaudit à l'intervention de l'artiste afin ne pas passer aux yeux des collègues, qui eux aussi font semblant de comprendre, pour l'imbécile de service. Le professeur d'une grande école de commerce expliquait à ses élèves un des principes de base du "savoir-vendre" par une maxime aussi simple que rigolote : "Plus la voiture que tu dois vendre est merdique, plus ta cravate doit être belle." Qui va mesurer la cravate de ces imposteurs ? Pour vous faire votre propre opinion, nous vous proposons la lecture du rapport sur l'étude "ESS et création de valeur : une approche prospective de la mesure d'impact social" (4). Le Labo de l’ESS, partenaire de cette étude avec la Fonda et l'Avise, nous en fait une présentation tellement caricaturale que l'on ne peut résister au plaisir de vous la faire partager (nous n'avons pas changé un seul mot) : "L'étude prospective 2017-2018 comporte trois étapes : une caractérisation des démarches évaluatives existantes, une cartographie des domaines d'innovation dans la mesure d'impact et une proposition de pistes d'actions pour une expérimentation de ce nouveau référentiel." Une bonne façon de commencer cette nouvelle année en rigolant un bon coup. En savoir plus (1) La Fonda est un think tank néolibéral qui a choisi, comme cheval de bataille, le secteur associatif. Sans la Fonda, pas de "mode de gouvernance" ni de "performance sociale" (comment oser accoler ces deux mots ensemble...). Aujourd'hui, la Fonda s'est rebaptisée "fabrique associative". Un glissement sémantique du plus haut intérêt La Fonda (2) Mais que vient faire l'Avise dans cette galère ? Tout simplement parce que son président d'honneur n'est autre que M. Hugues Sibille qui est aussi président du Labo ESS, président de la Fondation du Crédit Coopératif, président du Comité Français sur l'investissement à impact social (Social Impact Bonds) et j'en passe. Parmi les administrateurs de l'Avise, on retrouve Yannick Blanc qui est président de... la Fonda. Lire, à ce propos, le fabuleux rapport d'une neutralité exemplaire du même Comité Français sur l'investissement à impact social : Comment et pourquoi favoriser des investissements à impact social ? Tout un petit monde qui pense en rond sans aucun intérêt particulier à défendre... (3) Social Impact Bonds : Casino Royale ou Dangereusement vôtre ? (4) La présentation, par Le Labo ESS du rapport ou comment utiliser un argumentaire... et le fameux rapport : ESS et création de valeur : une approche prospective de la mesure d’impact social
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ESS et création de valeur : un petit rapport pour une grande imposture L'impact social est aujourd'hui un terme à la mode. Le mesurer est une occupation à plein temps. Le Conseil supérieur de l'ESS en donnait, en 2011, une définition passe partout du plus bel effet : "La capacité d'une <a href="https://www.loi1901.com/breves_associatives.php?moteur1=1151" target="_blank">Lire la suite sur Loi1901.com</a>
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